Le musée des pavés et des meules d’Épernon.
17 mai 2024
Nous sommes 15 à nous retrouver devant ce musée situé dans un endroit charmant ou gambadent de petits moutons. Nous aurions souhaité être plus nombreux car ce musée local est passionnant . Il évoque une activité économique qui a disparu mais qui a été importante pour cette petite ville proche de nous.
Ce musée a été crée il y a une vingtaine d’années par une équipe de bénévoles qui ont pu récupérer chez les particuliers une quantité d’outils spécifiques impressionnante. Il est installé en partie dans un pavillon qui a été celui de la Normandie à l’exposition universelle de 1900. Il avait été racheté par les Boucicaut créateurs du Bon Marché et élément d’une ferme expérimentale.
Ce musée comprend 2 parties :
- l’une consacrée aux pavés
- l’autre aux meules
La région d’ Épernon dispose dans son sous-sol de bancs de grès qui sont les mêmes que ceux de la région de Fontainebleau et qui ont une épaisseur de 3 à 5 mètres. Or la ville de Paris à l’époque des travaux du baron Haussmann a eu besoin de pavés pour les boulevards ouverts dans la ville. Épernon avait l’avantage de disposer d’une gare permettant un transport facile. Au plein moment d’activité 7 wagons quittaient Épernon chaque jour chargés de pavés. Une très belle maquette permet de voir ce qu’était la gare à cette époque.
Les ouvriers constituaient une population particulière qui avait eu maille à partir avec la justice. C’était un métier très rude et les ouvriers pour se soutenir buvaient beaucoup : il y avait à Épernon 50 estaminets pour 2000 habitants qui consommaient chaque année 4200 litres d’alcool pur. Ils se tenaient à l’écart de la population locale.
Il fallait d’abord repérer ou se trouvait le banc de grès, dégager les arbres qui se trouvaient souvent au dessus, enlever la couche de terre qui pouvait être importante puis s’attaquer au banc de grès. Pour cela on s’efforçait de fracturer la pierre le cas échéant à l’aide d’un explosif et de faire basculer la partie détachée. Si elle ne basculait pas on creusait au dessous dans le sable si besoin en envoyant un petit enfant qui courait un très gros risque. On utilisait des orphelins pour ne pas avoir de problèmes avec la famille….
Chaque ouvrier produisait 160 à 180 pavés par jour. La qualité des pavés pouvait être différente, cela s’entendait au bruit produit quand on tapait dessus. Les ouvriers travaillaient 15 heurs par jour et ils n’avaient qu’une journée de repos par semaine. Ils étaient dotés chacun d’une cote de maille pour se protéger l’artère fémorale qui risquait d’être atteinte quand ils taillaient
Il y avait une quantité d’outils spécialisés. Pour régulariser les bord on utilisait un peigne à tailler. Les pavés pour Paris faisaient 20 cm sur 20.
Le grès avait été utilisé pour construire l’aqueduc de Maintenon qui a mobilisé 15000 hommes. Pour acheminer les pierres jusqu’à Maintenon on avait canalisé la Drouette, l’Eure et la Voise.
L’activité des meules était différente car la meulière ne se trouve pas en bancs mais en morceaux isolés. L’extraction est très pénible car ces pierres sont extrêmement lourdes. Des collègues tenaient les épaules du porteur car il y avait un risque de déboîtement, une meule monolithique pouvait peser 800 kg.
Il faut d’abord tailler pour avoir un arrondi mais c’est souvent irrégulier et faut ajouter des quartiers qui sont scellés avec du ciment et au besoin on réalise un cerclage en fer. Par ailleurs périodiquement on doit recréer un rayonnage pour que la meule soit efficace étant préciser que dans un moulin il y a une meule dormante en dessous et une meule mobile au dessus.
La dernière compagnie en activité s’appelait l’Abrasienne d’ Épernon
Le musée contient de nombreuses maquettes de moulins :
- moulin romain à traction
- moulin bateau : il y en avait 9 accrochés aux ponts de Paris
- moulin à traction animale
- -moulin à vent : il y avait 600 en Beauce, il en reste 9 aujourd’hui
- moulin à turbine
Nous sommes repartis enchantés par cette visite sous la conduite d’un bénévole sympathique qui a consacré beaucoup de son temps pour faire revivre cette activité économique trop souvent méconnue.
R.BARBERYE