Samarkand et Boukhara, perles de la route de la soie

une conférence de Madame Christine DARMAGNAC, conférencière nationale.

Jean Berny présente la conférence

Soixante dix personnes ont assisté à cette conférence donnée au Nickel-Odéon et qui était en libre accès.

Les deux villes objets de cette conférence se situent aujourd’hui en Ouzbekistan que le public a souvent du mal à situer au milieu de l’Asie centrale. Cette région a d’ailleurs connue dans le passé plusieurs appellations : Sogdiane, Bactriane, Scythie.

De nos jours l’Asie centrale est une région qui s’étend sur 2500 km de large et 1500 kms de haut. Elle est formée de 5 républiques issues de la période soviètique:l’Ouzbekistan , le Kazakhstan, le Kirghiztan, le Tadjikistan et le Turkmenistan. Ce découpage qui date de 1937 n’a aucune réalité ethnique et visait indéniablement à favoriser les divisions. C’est ainsi que la riche vallée du Ferghana qui appartient à l’Ouzbekistan s’enfonce profondément dans le territoire de ses voisins. L’Ouzbekistan est peuplé très majoritairement d’ouzbeks mais on a compté dans le passé 10% de russes venus avec la conquête. On compte également un pourcentage de Tadjikhs qui à la différence des ouzbekhs sont des indo-européens.

L’Ouzbekistan est constitué très largement de déserts notamment le Kysylkoum et est inhabité à 80%. La mer d’Aral partagée avec le Kazakhstan est alimentée par deux fleuves:

  • -l’Amou Daria, l’ancien Oxus qui parcourt 1437km
  • -le Syr Daria qui parcourt 2137 km

En raison de l’irrigation nécessaire pour la culture du coton, la mer d’Aral avait quasiment  disparu; aujourd’hui la partie nord renaît peu à peu.

Cette région est très anciennement occupée par l’homme:on trouve dans la vallée des 1000 gravures, des gravures rupestres qui pourraient dater de 15000 ans avant notre ère. Au millieu du troisième millénaire, la civilisation de Sumer s’étendait jusqu’à cette zône : on a trouvé notamment une trompette en argent.

Au 7éme siècle av. notre ère s’étendait dans la région de Khiva au NW le pays du Khorezm qui a laissé notamment sur des buttes naturelles des constructions en briques , le châteaux de désert, qui étaient destinés à la surveillance des frontières . Ces châteaux ont été utilisés jusqu’au 13è siècle de notre ère.

Sous les Achéménides perses, le pays s’appelle le Touran et comprenait la Bactriane ,la Sogdiane et la Transoxiane.Alexandre plus tard traverse cette région en franchissant l’Oxus sur des ponts flottants. A noter qu’il y a quelques années la traversée de l’Amou Daria se faisait sur un pont flottant reposant sur des bateaux.

Après les Seleucides successeurs d’Alexandre pour l’Asie, se développe la route de la soie ainsi dénommée en 1877 par l’allemand Ferdinand von Richtoffen. Cette route qui n’a rien d’une autoroute est une série de morceaux de pistes qui s étend sur 10 à 12000km . Les étapes étaient de 35 à 40 km par jour et les marchands ne la parcouraient pas de bout en bout. Il y avait des lieux d’échanges aux étapes intermédiaires.

La ville de Samarkand a connu successivement trois noms et deux lieux :

  • -d’abord elle s’appellait Afrasyab et était située à un endroit bénéficiant d’une protection naturelle et ou il y avait de l’eau. Elle avait été dotée à l’époque perse d’une muraille de 5,5 km et de 6 m d’épaisseur construite en briques crues . Elle subit en 831 un tremblement de terre et en 1230 les ravages de la conquête de Gengis Khan
  • -en 329 av notre ère sur le même lieu elle s’appelle Maracanda et elle est protégée par une muraille de 13 km. On y conservait notamment des céréales.
  • -après le 2è siècle elle s’appelle Samarcande et est maîtresse de 30 villes. C’est l’époque préislamique et zoroastrienne. La ville comporte de nombreux palais et sur les fresques on peut reconnaître des chinois et des indiens, signe de l’intensité du commerce. Bien sûr la soie est le produit principal mais il y a aussi les pierres précieuses et la céramique.
Samarkance
Samarkande
Boukhara

Après une période de déclin, Tamerlan (1336-1405) fait revivre Samarcande après la conquête de la ville. C’est de là qu’il lance des opérations militaires dans toutes les directions. En 1387 il prend Ispahan, fait couper 100 000 têtes et installe autour de la ville 70 tours composées de 1500 têtes chacune.

Il fait construire à quelques kms son palais à Chakhsab réalisé trop rapidement en briques recouvertes de céramiques colorées. Il utilise pour ce faire des artisans déportés. Ce palais a mal supporté le temps car il a été affecté par des séismes et les écarts de température (moins 40° et plus 50°).

Il fait aussi construire le Gur-e-mir ou se trouve son tombeau(1400). La construction est très iranienne avec des minarets de 28m et un énorme dôme de 40m de haut et une coupole à nervures. L’ensemble est à plan de croix grecque.

L’endroit phare de Samarkand est la place du Reghistan qui était un marché au croisement de 6 routes . Se font face trois monuments de même style:une madrasa construite par Ulug Beg fils de Tamerlan, une autre datant de 1630 qui font de ce lieu un grand centre universitaire qui accueillait des miliers d’étudiants.Cet ensemble est complété par une mosquée.

Nous avons pu admirer de nombreux autres monuments tous extrêmement colorés : le monastère d’Ulug Beg qui était un grand astronome qui a fait construire un observatoire, le Chir dor (1619-1631) avec deux madrasas en miroir et à dômes à godrons, la mosquée de Bibi Khanoum l’épouse indienne de Tamerlan, le Shah-i- Zenda nécropole étonnante des 14 et 15é siècles.

Boukhara, le mausolée d’Ismaël le Samanide

Boukhara a été la capitale à l’époque des Samanides au 9é siècle. Un monument en briques cuites de cette époque contient le tombeau d’Ismael et est d’une archicture arabo-musulmane.Il se caractérise par sa finesse et son élégance malgré l’utilisation de briques non recouvertes de céramique. A l’époque Boukhara avait Samarkand sous son autorité. Elle était entourée d’une muraille de 13 kms comportant 11 portes et 116 demi-tours.

Boukhara, la MedersaLà aussi nous avons pu découvrir plusieurs monuments aussi beaux les uns que les autres : beaucoup de madrasas et de mosquées aux couleurs magnifiques, le Khanga Nadir Dwenbeg qui était un couvent pour derviches, le mausolée Naqchbantand qui abritait une confrérie coufie, le Tchor brak qui est une nécropole……

Le dernier khan de Boukhara, Alim Khan (1880-1944) s’était fait construire un palais à la mode occidentale mais de dimension relativement modeste.

In fine Mme Darmagnac a évoqué à juste titre la ville de Khiva qui fut une cité turcophone très importante et qui connut le déclin après sa défaite lors d’un conflit avec Kokand. Elle posséde elle aussi des fortifications impressionnantes avec un remblai de 7 à 8 mètres. Devenue une ville musée elle renaît de nos jours avec un retour des populations à l’intérieur de la ville.La ville contient des bâtiments tout à fait remarquables avec notamment la grande mosquée du vendredi avec ses 280 colonnes en bois.

L’Ozbekistan est aujourd’hui une destination touristique très prisée. Après l’éclatement de l’URSS , il a connu et connait encore comme d’autres un régime dictatorial marqué, ce n’est pas une originalité , par la corruption. Ce régime a contenu d’une main de fer le développement de l’islamisme notamment dans la vallée de Ferghana alimenté notamment par la frontière avec l’Afghanistan . C’est aujourd’hui un pays sûr.

Cette conférence a permis une belle ouverture sur une région peu connue et qui abrite des monuments colorés tout à fait splendides.

René Barberye

Boukhara
Boukhara
Khiva

Clichés René Barberye et Jean-Paul Asse